Il y a quelques attitudes et phrases qui peuvent vraiment gâcher nos balades et séances d’entraînement. Comme les fameux: « ne vous inquiétez pas, il est gentil » quand un chien déboule à grande vitesse sur un pauvre loulou qui n’a pas du tout envie d’interagir avec un congénère. Il y a aussi: « ohhh mais moi, j’adore les chiens, ça ne me dérange pas qu’il me saute dessus » alors qu’on est en pleine séance de travail pour apprendre à un chiot à mieux se contrôler dans les lieux publics.
Oui, ça part d’une bonne intention, mais ce sont des réactions un tantinet égoïstes, qui peuvent causer du tort à l’apprentissage d’un chien et impacter son bien-être en balade – ainsi que le notre. Et c’est le message que nous tentons de faire passer quand nous poussons des petits coups de gueule. On demande simplement un peu de considération et de précaution.
S’imposer et juger … une situation récurrente
Il y a aussi des injonctions comme celles citées dans le titre, qui sont souvent lâchées par d’illustres inconnus au détour d’une promenade ou d’une séance. C’était le cas il y a quelques jours, lors d’une séance avec une chienne craintive. Cette dernière a des réactions de fuite très intenses dans certaines situations. Elle peut aussi avoir des comportements agressifs lorsqu’elle se sent coincée. Ce qui peut se produire si un humain ou un chien entre dans sa bulle de sécurité.
Elle adore se promener, mais les croisements avec des humains sont encore difficiles. Nous travaillons avec sa gardienne pour aider la louloute à prendre confiance et à surpasser ses peurs en douceur. Vu son passé de chien libre (chienne de Roumanie) encore très récent, elle n’est pas encore lâchée en promenade. Le lien se construit doucement avec ses gardiens et une situation stressante peut la faire fuir ; on risque de ne pas pouvoir la récupérer. Il est donc crucial de la garder en laisse/longe et de maintenir une distance avec ce qui lui fait peur.
Toutes ces informations, la dame avec son Berger blanc suisse ne les connaissait pas. En supposant probablement que tous les chiens doivent avoir les mêmes réactions, elle s’est approchée de nous, alors que la petite Roumaine a peur des inconnus. En tendant sa main pour la caresser, elle a causé une réaction de panique. La chienne, ainsi que sa gardienne et moi, nous sommes senties envahies et oppressées par cette dame, qui pourtant, avait certainement de bonnes intentions. Malgré cela, nous sommes restées courtoises et lui avons expliqué que la chienne est craintive et qu’elle a besoin d’espace. Nous lui avons gentiment demandé de s’éloigner et d’appeler son chien, car il tournait de manière insistante autour de la chienne – cette dernière montrait d’ailleurs de plus en plus de signes de stress et tentait de s’extirper de son harnais. Cette demande a déclenché la colère de la dame, qui s’est mise à crier: « NON je n’attache jamais mon chien ! Mais vous, lâchez-la bon dieu, vous ne lui apprenez rien de bon, les chiens se débrouillent très bien entre eux ! ». Elle ajoute: « c’est parce que vous la surprotégez qu’elle est aussi craintive ! ».
Ça fait beaucoup de jugements, n’est-ce pas? Et tout cela, sans rien connaitre de la chienne, ni de sa vie, son passé et sa personnalité.
Respecter les besoins des autres
Pourquoi je vous raconte cette histoire ? Parce qu’elle se répète trop souvent et que beaucoup de gens ne semblent pas comprendre que les besoins des autres peuvent être différents des leurs. Je crois vraiment que ce genre de témoignage peut faire réfléchir et pourquoi pas, prendre conscience de certaines choses. Les phrases et injonctions dont je parle sont souvent prononcées par des personnes bien intentionnées, mais qui ignorent ce que ressentent les autres. Le problème, c’est que ces attitudes peuvent causer beaucoup de tort. Dans le cas de cette chienne, cette expérience nous a potentiellement fait faire un retour en arrière dans ses apprentissages.
Deux points importants qui ressortent de ces expériences: le manque de considération des besoins de l’autre (notamment, le besoin d’espace), ainsi que des opinions non-informées qui dénotent souvent une vision simpliste des comportements canins.
Anticiper et se mettre à la place de l’autre
Il est important de ne pas oublier que les autres ont des besoins différents des nôtres – ou de notre chien. Et pour cela, on peut prendre des précautions en anticipant plusieurs possibilités :
Les chiens et leurs humains n’ont peut-être pas envie d’interagir avec d’autres individus. Nous avons chacun nos besoins et envies ; certains sont bien heureux de faire leur balade tranquillement, sans interagir avec des inconnus. Parfois, on ne souhaite tout simplement pas discuter ou interagir avec autrui.
Parce qu’il est impossible de savoir comment ils vont réagir. C’est très important d’anticiper les différentes réactions, surtout lors des rencontres canines. Comme les humains, les chiens ont leur personnalité propre, leurs humeurs et leur histoire. Ils ne sont pas des robots qui réagissent de la même manière tout le temps. Même un chien joueur peut, à un moment donné, ne pas avoir envie de jouer.
Les chiens ne sont pas tous joueurs et même si votre chien est sympa, il n’aura pas forcément un chien joueur en face de lui. Le jeu doit être une interaction partagée, avec du consentement des deux côtés et le respect des règles du jeu. Ce n’est pas toujours le cas et c’est ce qui fait que beaucoup de bagarres se déclenchent après quelques minutes de jeu. «Pourtant ils s’entendaient bien…». En fait, non, ça ne se passait pas bien, contrairement à ce qu’on percevait.
Les chiens ne savent pas toujours gérer et il y a plein de choses à prendre en compte pour qu’une rencontre se passe bien. Non, les laisser faire, n’est pas forcément une bonne idée. J’en parle plus en détail dans les deux articles suivants:
L’autre chien a peut-être eu de très mauvaises expériences avec ses congénères (ou des humains) dans le passé ; il en a peur et il va certainement se mettre sur la défensive à l’approche d’un autre. Ce n’est pas en étant lâché avec un autre chien qu’il va prendre confiance. Car l’autre n’aura pas forcément les bonnes réactions face à un chien peu confiant. Et ce n’est certainement pas à un inconnu de juger ce dont a besoin un chien qu’il ne connaît pas.
Respecter l’espace de l’autre et demander si une approche est possible
Il y a tout un tas de raisons qui font qu’on ne pourra avoir une rencontre sereine et qu’on ne respectera pas l’autre (chien ou humain) en s’approchant, ou en laissant notre chien s’imposer dans leur balade. Le minimum à faire pour éviter les rencontres difficiles est de demander à l’autre gardien si une approche est possible.
Une idée, toute simple, qui pourrait permettre à tous de faire des balades plus sereines; quand on voit un promeneur avec un chien en laisse, on attache le nôtre pour faire le croisement et on demande l’accord du gardien si on veut faire une approche ou lâcher notre compagnon.