L’EMPILEMENT DES DÉCLENCHEURS (1/2)


Conseils pratiques, Thérapies / mercredi, juin 9th, 2021

La goutte d’eau qui fait déborder le vase

Selon leur tempérament, leurs expériences, la qualité de leurs rencontres, l’environnement dans lequel ils grandissent (et d’autres facteurs), les chiens sont plus ou moins sensibles aux stimuli du quotidien. Certains chiens semblent être à l’aise dans tous les contextes, ou presque, alors que d’autres vont réagir de manière disproportionnée face à un petit événement.

L’empilement des déclencheurs

C’est un phénomène qui se produit chez tout le monde; chiens et humains inclus. C’est le fait d’encaisser, jusqu’au moment où ce n’est plus possible – ce qui nous fait réagir d’une façon ou d’une autre. D’où la fameuse expression « c’est la goutte d’eau qui fait déborder le vase ».

Nous risquons tous d’exploser si nous faisons face à un enchaînement d’événements stressants. C’est la même chose pour les chiens. Lorsqu’un individu est stimulé par quelque chose dans son environnement, des changements physiologiques se produisent.

À chaque événement stressant, le corps sécrète des substances qui permettent à l’individu de réagir pour gérer la situation – par exemple, pour activer la réponse fuite-combat. C’est le cas du cortisol, ce dernier étant surnommé l’hormone de stress. Son rôle est d’aider l’organisme à faire face à un événement stressant, en mobilisant l’énergie nécessaire pour nourrir les muscles, le cerveau, mais aussi réguler la pression artérielle. Ses niveaux augmentent à chaque événement stressant et ils s’abaissent progressivement lorsque l’individu n’est plus en situation stressante (c’est la phase de relâchement). Si des événements stressants sont trop rapprochés dans la durée, les niveaux ne feront qu’augmenter, ce qui poussera le chien au-dessus de ce qu’on peut visualiser comme un seuil de tolérance au stress – qui génère des réactions souvent intenses et problématiques, à nos yeux (ex: agressivité).

Tous les chiens fonctionnent différemment

Et tout est relatif:
– Ce qui stresse un animal n’en stresse pas forcément un autre.
– L’intensité du déclencheur n’est pas la même pour tous. Un chien peut très bien tolérer un congénère à 50 mètres et un autre se mettra dans tous ses états à la vue du chien à la même distance.
– La tolérance au stress varie selon les individus; certains y étant beaucoup moins sensibles que d’autres, comme chez les humains. Ce qui fait que chaque chien est unique dans sa façon de percevoir et réagir face aux stimuli environnementaux.

Ce sont donc des choses qu’il faut apprendre à connaître en observant l’animal – c’est une part importante du travail lorsqu’on aide les chiens dits ‘réactifs’, par exemple.

Les déclencheurs insoupçonnés

Ce sont des stimuli, qui isolés, ne déclenchent pas de réaction particulièrement problématique. Un oiseau qui s’envole, un passant avec une démarche étrange, une personne avec un chapeau, un enfant qui court en poussant un cri, le bruit d’un hélicoptère au dessus de vos têtes, un jogger… Votre chien n’a peut-être jamais montré de signes de stress face à ces stimuli, mais cela ne veut pas dire qu’il n’y est pas sensible. D’ailleurs, tout ce qui se produit soudainement peut générer un stress, plus ou moins important, même s’il n’y a pas de danger.

Si votre chien est parfaitement détendu et qu’une moto bruyante passe à côté de lui en début de promenade, cela ne déclenchera probablement pas de réaction. Mais si cela se produit en fin de balade, après avoir croisé des joggers ou des chiens qui lui ont aboyé dessus derrière des portails, après avoir entendu des bruits étranges, la sirène des pompiers, des klaxons dans la rue… Alors là, une moto qui passe à côté de lui a beaucoup plus de chance de déclencher une réaction (ex: aboiement) – parce que tous ces événements ont possiblement créé un empilement des déclencheurs (du stress).

Ce sont certainement des « petits » déclencheurs, qui séparément ne causent aucune réaction négative, mais qui l’un après l’autre, ont fait monter la pression… une série d’événements (plus ou moins stressants, plus ou moins anodins) conduisent à une réaction vive sur les prochains déclencheurs. Un peu comme dans le film « La chute », pour ceux qui l’ont vu 😉

Quand on travaille avec un chien qui s’énerve après ses congénères (ou autre chose), il est important de faire attention à ce phénomène. Par exemple, il peut très bien tolérer un certain nombre de croisements, mais si on prend le risque d’en faire trop, on peut re-déclencher une mauvaise réaction. Même s’il est maintenant à l’aise avec la présence d’autres chiens dans son environnement, car ses réactions vis-à-vis d’eux sont moins intenses (le stress est moins intense). Prendre en compte cette notion d’empilement des déclencheurs peut éviter de gros retours en arrière.

Géraldine Merry, Comportementaliste

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