BIEN-ÊTRE CANIN ET METHODES D’ÉDUCATION


Education canine, Relation homme-animal / jeudi, novembre 19th, 2020

Vous avez probablement vu la récente enquête de One Voice, qui dénonce les méthodes d’éducation actuellement utilisées par certains « éducateurs » en France. Une vidéo difficile à regarder et à écouter. Ça tire brutalement sur le collier, plaque le chien sur une table, l’appelle une « saloperie ». Un type crie « tire, tire, tire (sur le chien), c’est bien, il sera traumatisé comme ça ». Ça gueule, ça tape, ça tire les oreilles, tout ça pour des assis, couché et marche au pied.

L’association, qui oeuvre pour le bien-être animal, est assignée en justice par une trentaine d’éducateurs, car elle aurait, selon eux, « entaché l’intégralité d’une profession » (en dénonçant les pratiques de quelques uns !?!). Autant vous dire sans hésitation que je me joins aux 350 professionnels qui apportent leur soutien à One Voice. Ce sont les éducateurs capables des violences qu’on voit dans cette vidéo, qui entachent notre profession!

Pourquoi la violence est-elle autant banalisée ?

Regardons du côté de l’histoire de l’éducation canine. Les premiers éducateurs « célèbres », dans la première moitié du 20e siècle, étaient de la police ou de l’armée. Des milieux très hierarchisés qui à l’époque, avaient des entraînements à la dure.

Wiliam Koehler (le « dresseur » pour Disney Studios dans les années 50) conseillait de remplir le trou qu’avait creusé un chien avec de l’eau et de lui mettre la tête dedans ; pour lui apprendre à ne pas creuser. C’est Koehler qui a popularisé l’éducation canine aux Etats-Unis; les gens suivaient ses conseils pour avoir un chien « comme dans les films ». Malheureusement, ses méthodes sont encore d’actualité, comme on peut le voir dans la vidéo de One Voice.

Même si en parallèle, Skinner, Pavlov & co amélioraient considérablement nos connaissances sur les mécanismes d’apprentissages, leurs découvertes sont restées dans la bulle de la science pendant des décennies. La lente popularisation du renforcement positif a débuté dans les années 80-90, grâce à des spécialistes comme le Dr. Ian Dunbar (entre autres). Mais à ce moment-là, les méthodes coercitives et la théorie de la dominance sont bien installées dans le milieu ; une majorité des éducateurs de l’époque travaillaient avec ces méthodes. Tout le monde voulait être « the leader of the pack ».

Pourquoi ça marche encore ?

En effet l’éducation canine est encore imprégnée de ces méthodes pour une autre raison : elles fonctionnent ! Parce qu’on peut changer le comportement d’un chien avec des conséquences désagréables. Ceci s’explique également par les lois de l’apprentissage. La motivation d’éviter la douleur/punition nous permet de manipuler son comportement. Le chien ne va pas tirer, ou aboyer sur les cyclistes, si à chaque fois qu’il le fait, son gardien le pend au bout de la laisse. Il va l’éviter et donc, changer son comportement. Mais imaginez un peu comment il perçoit son « gardien » et les cyclistes après ça ! Les chiens éduqués avec ce genre de méthodes sont des bombes à retardement.

Difficile donc de lutter contre un tel paradigme, notamment, après presque un siècle de mise en pratique à grande échelle.

Les croyances sont bien ancrées, ces méthodes sont banalisées, des types super connus passent à la télé et continuent de pendre des chiens au bout de leur laisse. Quand on ne connaît pas bien l’espèce et qu’on n’a pas les outils nécessaires pour la comprendre (ou qu’on ne cherche pas à le faire), on apprend à travers les connaissances d’un « spécialiste ». Parce qu’on n’y connaît pas grand chose à part ce qu’on entend ci-et-là, on fait confiance à celui qui exerce cette profession légalement, c’est logique. Malheureusement, c’est une profession mal réglementée et n’importe qui, ou presque, peut exercer.

Pourquoi ne pas le faire, si ça marche ?

Des études sur les effets des méthodes d’éducation canine sont essentielles pour répondre à des questions éthiques. Beaucoup d’études scientifiques sont menées pour améliorer nos connaissances. Comme cette étude récente qui montre l’impact négatif des méthodes aversives sur le bien-être des chiens. Les critères de bien-être sont basés sur des mesures physiologiques et comportementales du stress, ainsi que la performance à l’execution d’une tâche. Les résultats indiquent que ces méthodes d’éducation génèrent plus de stress et impactent le bien-être de l’animal. Cette étude indique que crier sur son chien peut avoir un impact négatif sur le court comme le long terme.

Une autre étude récente a montré que le lien d’attachement entre l’humain et le chien est impacté de la même manière par les différentes méthodes d’éducation.

L’éducation canine permet de modifier le comportement d’un animal, mais le faire dans la douleur et la violence réduit significativement son bien-être et détruit nos liens.

Un éducateur bloqué sur des méthodes d’un autre temps, qui sont prouvées néfastes pour les animaux et la relation humain-chien, même s’il a 20 ans d’expérience dans le métier, manque clairement de connaissances et de mise à jour, ou alors c’est un sadique dominateur qui n’a aucune empathie !

References:

Does training method matter? Evidence for the negative impact of aversive-based methods on companion dog welfare (2019), doi : https://doi.org/10.1101/823427
Carrots versus sticks: The relationship between training methods and dogowner attachment (2019) : https://doi.org/10.1016/j.applanim.2019.104831
La vidéo de One Voice : https://one-voice.fr/…/des-chiens-violentes-dans-les-clubs

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