Parmi les conseils les plus courants pour les problèmes d’anxiété de séparation / solitude, il y a celui d’ignorer son chien lorsqu’on part de chez soi et lorsqu’on revient. Et ce, jusqu’à ce qu’il soit calme. C’est d’ailleurs un conseil qui est très souvent appliqué sans autre protocole.
Mais est-ce vraiment efficace ?
La détresse (anxiété) de séparation
C’est l’un des problèmes comportementaux les plus courants chez les chiens; l’anxiété de séparation toucherait entre 13% et 17% des chiens de compagnie. Les signes apparaissent quand le gardien va dans une autre pièce ou sort de la maison, et/ou quand le chien se retrouve seul.
Les comportements les plus courants sont la destruction, la malpropreté, les aboiements excessifs et une grande agitation. L’intensité de ces comportements varie selon les chiens. Et malheureusement, dans beaucoup de cas, ce problème conduit à l’abandon ou à l’euthanasie.
Les causes de l’anxiété de séparation ne sont pas bien comprises. Les facteurs de risques incluent la race, le mode de vie du gardien, la génétique, l’historique d’abandon, un mauvais apprentissage de la solitude et les attitudes du gardien (favorisant des comportements dépendants). Cela dit les liens de causalité restent à confirmer.
Pourquoi on conseille d’ignorer le chien ?
Plusieurs formes de thérapies sont conseillées pour ces problèmes, et de nombreux experts (et études) considèrent que la désensibilisation systématique est la plus efficace. C’est une thérapie par laquelle on augmente très progressivement la durée des absences. Bien que difficile à mettre en place, elle est généralement associée à une amélioration très significative.
Cela dit, on peut voir beaucoup d’autres conseils, plus ou moins efficaces, mais très souvent donnés sans d’autres informations. Ceux-ci incluent par exemple : laisser la télévision/radio allumée, laisser des activités de nourrissage (Ex: Kong) à disposition, ou encore, ignorer son chien avant le départ et au retour.
Pour ce dernier conseil, le but serait de maintenir l’excitation du chien à des niveaux très bas. Ignorer le chien semblerait lui permettre d’associer les départs et arrivées avec du calme, et cela éviterait que les signaux de départ soient associés à des réactions de stress et d’anxiété. Les rituels de départ et d’arrivée, ainsi que l’excitation, semblent pouvoir déclencher des réactions anxieuses, mais il y a eu très peu d’études menées sur le sujet.
Seule une étude (1) a trouvé une corrélation entre des séances de jeux juste après le retour du gardien et le développement de l’anxiété de séparation.
Un lien entre interactions et développement de l’anxiété de séparation ?
Une étude préliminaire (2) publiée en juin 2020 n’a trouvé aucun lien évident entre le développement de l’anxiété de séparation et des interactions excitantes au départ et à l’arrivée.
Les chiens étaient divisés en deux groupes ; dans le premier groupe, les gardiens interagissaient de manière calme, et dans le deuxième groupe, les gardiens jouaient ou interagissaient de façon à les exciter. Les résultats ont même trouvé une association plus significative entre le groupe « calme » et le développement de l’anxiété de séparation. Mais cela peut être dû aux conseils reçus lorsque les gardiens ont perçu les premiers signes du problème. Les résultats ne confirment donc pas un lien de causalité entre les deux facteurs.
Cette étude incluait également une enquête (questionnaire) menée auprès d’environ 2000 gardiens. Là encore, les résultats ne confirment pas de lien de causalité entre la façon d’interagir avec un chien au départ et à l’arrivée, et le développement de l’anxiété de séparation.
Faut-il conseiller d’ignorer le chien ?
Les interactions au départ et au retour ne semblent pas jouer un très grand rôle dans le développement de l’anxiété de séparation, mais le fait de maintenir le calme est possiblement un facteur important dans la gestion émotionnelle du chien, particulièrement au départ du gardien.
Personnellement, je ne conseille pas d’ignorer le chien, et ce, pour plusieurs raisons :
- Ce n’est pas très sympa, c’est possiblement frustrant et anxiogène pour lui. Particulièrement, au retour lorsqu’il est très heureux de nous voir.
- Un chien a besoin de signaux rassurants et cohérents.
- Cela peut nous contrarier nous aussi, et notre chien peut ressentir ce désarroi.
- Rien ne nous empêche de maintenir le calme lorsque nous interagissons avec notre chien, nous pouvons même l’entraîner à cela.
- Il faut régler le problème de manière plus globale et donc, ne pas simplement se baser sur ce conseil. Donné seul, il ne changera certainement pas grand chose.
Mon Snowee a fait une grosse anxiété de séparation lorsque je l’ai eu. La gestion s’est faite totalement différemment (par la désensibilisation systématique) et j’ai toujours continué à lui dire bonjour de manière expressive. Je lui « fais la fête », comme on dit. Ça n’a pas empêché de régler le problème, il peut maintenant rester seul sans stresser.
En conclusion…
Vous pouvez maintenir le calme, par principe de précaution, mais n’ignorez pas votre chien. Banalisez vos départs, créez des signaux de départ positifs plutôt que de les rendre anxiogènes, n’ignorez pas votre chien au retour, mais saluez-le calmement si vous avez l’impression que cela influence son comportement durant vos absences (par exemple, s’il vous attend derrière la porte).
Il y a plein de choses à mettre en place pour travailler sur ce problème, et la meilleure est de contacter un professionnel expérimenté dans la gestion de ces problèmes comportementaux.
Et une dernière chose, on doit travailler sur l’émotion et les anticipations, et non le comportement (aboyer, détruire…). Dans le deuxième cas, on vous proposera simplement d’éliminer le comportement; par exemple, en mettant le chien destructeur en cage. Si un professionnel ne vous donne pas de conseils pour aider votre chien à mieux gérer ses émotions… Vous pouvez aller chercher ailleurs